Effervescence printanière !

Très chers lecteurs,
Demain, vingtième jour de mars, nous franchirons le seuil tant attendu du Printemps, ce bien-aimé renouveau que la nature nous octroie avec une constance inébranlable. Les âmes languissantes des longs hivers n’auront plus qu’à se gorger des bienfaits de la clarté retrouvée, des exhalaisons suaves des bourgeons, et du chant mélodieux des oisillons nouvellement éclos.
En maints villages, l’on voyait jadis se dresser l’arbre de Mai, symbole éclatant du réveil de la nature et de la sève montante. En certaines terres, l’on pratiquait des aspersions d’eau afin de purifier hommes et bêtes, en un usage dont la persistance, aux confins de la Bretagne et du Languedoc, n’étonnerait guère ceux qui goûtent aux traditions anciennes.

Mais loin de nous contenter de ressasser les fastes d’antan, il est de mon devoir de vous entretenir du Grand Événement de la Saison, dont l’organisation bat son plein, faisant bruisser les plus vives spéculations.
Le très méticuleux comité organisateur accueille presque chaque jour en l’Hôtel de ville une kyrielle de prestataires, tous plus empressés les uns que les autres de démontrer la magnificence de leurs talents. Que de promesses, que d’effusions, que de démonstrations où chacun entend surpasser son rival en hardiesse et en éclat ! D’aucuns s’essaient aux prodiges de la voltige équestre, bravant les lois naturelles avec une aisance qui force le respect. Les maîtres fauconniers exhibent leurs nobles rapaces, en un ballet ailé dont l’élégance et la rigueur rappellent les cours les plus raffinées d’Europe.

L’on nous promet également des saynètes de rue, menées avec verve par des comédiens rompus aux facéties et mystifications les plus délicates, tandis que saltimbanques, bateleurs et troubadours s’emploieront à ravir le bon peuple de leurs acrobaties et mélopées.
Et que dire des prestidigitateurs du feu, qui s’exerceront en mille jeux pyrotechniques, rivalisant d’ingéniosité pour illuminer le firmament d’éclats éblouissants ? Les marmots ne seront point oubliés, car moult jeux et divertissements leur seront dévolus. Pour les épicuriens, les marchands de friandises et d’entremets rares dresseront des étals regorgeant de délices capables d’égayer les palais les plus blasés, tandis que les artisans les plus habiles proposeront des merveilles façonnées par leur main experte.

Tout est scruté, tout est pesé, rien ne saurait être laissé au caprice du hasard ! Chaque détail fait l’objet d’un examen minutieux, car nulle place ne saurait être concédée à la médiocrité. Il me plaît à penser que dans mes prochaines missives, j’aurai loisir de vous révéler quelque indiscrétion savoureuse, glanée au détour d’une antichambre ou susurrée par quelque témoin privilégié.

Que l’on se tienne prêt, car bientôt, les rouages secrets de cet événement prodigieux se dévoileront à ceux qui auront l’oreille fine et l’esprit alerte…
Votre dévoué,
Sir Etienne de Saint-Geoirs