

Les rues s’éveilleront comme un théâtre à ciel ouvert, et Saint‑Étienne de Saint‑Geoirs deviendra cette ville-monde où chaque coin de trottoir cachera une surprise, un frisson, un éclat. Il n’y aura plus de samedi ou de dimanche, seulement un présent intense et multiple. On avancera, on tournera la tête, et tout se passera. Là, un enfant chevauchera un cheval de bois en criant qu’il est bandit d’honneur. Plus loin, un homme en veste chamarrée taillera des godillots comme on cisèle un destin. Une bête paisible ruminera à l’ombre d’un chapiteau pendant qu’un carrousel lancera sa ronde, enivré de rires clairs. On entendra des coups de feu sortant de mousquets d’époque, puis des sabres s’entrechoquant dans des duels chorégraphiés au cordeau.
D’un trottoir à l’autre, les époques se croiseront sans s’excuser. Ici, la soie d’une robe glissera sur une balustrade. Là, une rapière fendra l’air au ralenti. Sous un appentis, des mains calleuses redonneront vie à l’artisanat d’antan.
Des voix s’élèveront, des chants se croiseront, des pas s’accorderont sans qu’on les ait répétés. La fête inventera sa propre grammaire. Dans cette joyeuse anarchie, on rira, on flânera, on s’éblouira. Les tavernes déborderont.
Le vin coulera, les pains doreront, les viandes rôtiront, les sirops enivreront. On ne mangera pas, on goûtera le monde.
Puis, les pavés vibreront d’un frisson ancien. Comme sortis d’un vieux rêve, les chars surgiront, rutilants, escortés de clameurs et de tambours battants. On applaudira sans savoir pourquoi. Et ce sera bien là le plus beau des plaisirs : celui d’être emporté. Quand viendra la nuit… ce ne sera pas une tombée. Ce sera une montée, une montée vers l’incandescence.
Les flambeaux s’allumeront, les corps frémiront, les chevaux s’élanceront dans un ballet de feu. Des gerbes d’étincelles jailliront autour d’eux comme des cris d’étoiles. Les yeux s’écarquilleront, les poitrines battront. Ce ne sera plus un spectacle, ce sera une fièvre. Et lorsque le silence retombera… ce sera pour mieux laisser place à la musique. La place centrale se transformera en piste enflammée. Les robes tournoyeront, les pieds s’oublieront et chacun dansera comme s’il n’y avait jamais eu de lendemain. Mais le lendemain viendra. Et il portera haut la promesse d’un second souffle toute la journée durant; jusqu’à ce que le soleil se plonge pour la dernière fois derrière les toits du village. Alors, un feu d’artifice grandiose viendra signer ces deux journées d’ivresse avec une salve de lumière, de souffle et de promesses renouvelées.
Deux jours. Mais en vérité, tout un monde. Saint‑Étienne n’aura plus le même goût après cela. Et vous non plus…
Votre dévoué,
Sir Etienne de Saint-Geoirs
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